Vous connaissiez surement Sabrina l’apprentie sorcière. La revoici, mais version beaucoup plus flippante. En effet, cette nouvelle série intitulée « les nouvelles aventures de Sabrina » (ou « chilling adventures of Sabrina » en anglais), tient plus de l’épouvante.
Sabrina (jouée Kiernan Shipka) est mi-humaine mi-sorcière et vit avec ses deux tantes, Hilda et Zelda, ainsi que son cousin, Ambrose. Elle va au lycée avec des humains qui ne connaissent pas son statut de sorcière : Roz et Susie, ainsi que Harvey son petit ami. Dans quelques jours, elle aura 16 ans et devra passer son « baptême obscur » lors duquel elle vouera sa dévotion à Satan. Ce rite de passage permet ensuite d’aller étudier la magie à l’Académie des Arts Invisibles. Le problème, c’est que Sabrina n’est pas très sure de vouloir passer son baptême obscur et va commencer à investiguer sur ce que cela signifie réellement.
(Psst avant de continuer, voici le lien si vous voulez soutenir mon travail sur tipeee)
Les thèmes du libre arbitre et du consentement éclairé sont très présents dans la série : Sabrina a bien l’intention de comprendre tous les tenants et les aboutissants de ce qu’on lui demande de faire avant de décider si oui ou non elle le fera. Elle n’hésite pas non plus à remettre en questions des traditions ou des systèmes de pensée oppressifs et dépassés ou à carrément s’opposer à des pratiques inacceptables chez les sorcières.
Mais ce n’est pas tout car Sabrina s’indigne face à l’injustice également du côté des humains : Roz, Susie et elle mettent en place un club de féminisme intersectionnel dans leur lycée, après que Susie ait été victime de harcèlement queerphobe. Sabrina soutient également Harvey alors que son père est violent et tente d’imposer à son fils une bonne dose de masculinité toxique [spoiler : il veut le forcer à travailler dans les mines et lui faire abandonner sa passion pour la BD].
Bref, Sabrina a tout d’une activiste : pas de quartier pour le sexisme, la queerphobie, le harcèlement scolaire…
La jeune sorcière est également bien entourée.
Tout d’abord, son cousin Ambrose (joué par Chance Perdomo) se révèle être un excellent allié : il lui offre de précieux conseils sur la magie, voire l’aide, sans jamais lui enlever son consentement éclairé (contrairement à sa tante Zelda qui a une fâcheuse tendance à vouloir imposer tout un tas de choses à sa nièce, étant trop soucieuse de ne pas déranger l’ordre établi). Ambrose n’est pas du genre à suivre aveuglément la masse et à se faire avoir par le bullshit d’une institution oppressive et poussiéreuse. Honnêtement, c’était mon personnage préféré.
Et cerise sur le gâteau : il est pansexuel. Or c’est encore assez rare d’avoir des personnages de mecs bi/pan, la représentation étant plus développée du côté des femmes bi/pan. Et c’est pas juste du queerbaiting, sa pansexualité est belle et bien présente dans la série. Il aura notamment une aventure avec un certain Lucas.
Et honnêtement, je ne pourrais pas mieux dire que l’acteur qui incarne Ambrose à ce sujet : « Il était temps, si je puis dire, nous avons vu l’histoire de l’héroïque homme blanc perpétuée à Hollywood depuis des temps immémoriaux, n’est-ce pas ? Alors maintenant nous avons une personne pansexuelle racisée représentée avec de la profondeur et comme un individu multi-facettes qui n’est pas seulement artistiquement satisfaisant mais aussi gratifiant (…) un être humain plus représentatif du monde dans lequel on vit. »
Pour continuer dans les personnages queer, Susie est canoniquement non-binaire (le pronom elle est utilisé dans cette saison pour désigner ce personnage). Susie est joué-e par l’acteur-ice non-binaire Lachlan Watson – il est important qu’un-e acteur-ice non-binaire joue un personnage non-binaire pour tout un tas de raisons, c’est donc un très très bon point pour la série !
Il y a de nombreuses références à sa transidentité au cours de la saison. Elle est tout d’abord victime de harcèlement queerphobe. Des garçons de son lycée la traitent de gouine (dyke) et soulèvent son tee-shirt pour vérifier « si c’est une fille ou un garçon ». Un peu plus tard dans la série, quelqu’un la traite « d’abomination fille-garçon » (sympa…) Enfin, la grand-mère de Roz, alors qu’elle ne la connaît pas, la désigne comme un garçon.
La non-binarité du personnage est bien traitée : il s’agit d’une jeune personne au tout début de sa découverte du genre, qui ne s’affirme pas encore et qui fait face à diverses difficultés identitaires et de harcèlement. Malgré cela, la narration prend clairement position contre la transphobie et Susie reçoit toujours le soutien de ses amies. Somme toute, la non-binarité et les difficultés de la transphobie sont représentés avec justesse sans pour autant être le centre de l’histoire ni verser dans un pathos excessif ce qui offre un bon équilibre. Considérant la quasi-inexistence de la représentation non-binaire, voir un bon personnage non-binaire joué par un-e acteur-ice non-binaire est assez révolutionnaire et donne de l’espoir pour le futur.
Il y a bien d’autres personnages et thèmes intéressants dans les nouvelles aventures de Sabrina mais je ne pourrais décemment pas analyser 10 heures d’écran en un seul article que je voudrais garder court. J’espère cependant vous avoir donné envie d’aller voir par vous-mêmes cette excellente série. Bon visionnage 😉
Ton article me donne très envie de regarder la série 🙂
Merci de me faire découvrir des séries avec des analyses intéressantes !
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